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Le seul véritable enjeu géopolitique de la guerre en Ukraine était d’éviter qu’en offrant un nouveau succès facile à la Russie, on l’enhardisse. C’est-à-dire que la Russie, dans la foulée d’une victoire facile en Ukraine, ne s’intéresse d’un peu trop près aux États baltes, et pourquoi pas à la Pologne. Ce scénario, soutenu entre autres par l’historien Philippe Fabry, n’avait rien d’absurde et l’histoire millénaire de l’impérialisme russe en atteste.

 

Cet objectif, il est atteint, et de maîtresse façon. Ce que les Russes ont démontré sur le terrain, depuis huit mois, est qu’ils ne sont en aucune façon une menace pour l’OTAN. Le régime russe n’a ni les moyens militaires, ni les moyens humains, ni les moyens économiques d’entrer en confrontation directe avec l’OTAN. L’OTAN arme et renseigne l’Ukraine ; mais ce ne sont pas les troupes de l’OTAN qui combattent en Ukraine. Cet ‘OTAN ultralight’ suffit à faire échec aux Russes. CQFD.

 

Toutefois, il faut se rappeler l’adage grec hybris, nemesis, pour éviter de verser à notre tour dans cette arrogance qui précède la chute. Notre vrai objectif de guerre en Ukraine est atteint, il serait délirant d’improviser un nouvel objectif qui serait, par exemple, un changement de régime à Moscou. Un tel objectif serait aberrant ; l’improviser, davantage encore. La Russie est la première puissance nucléaire mondiale. Rien ne dit que le successeur de M. Poutine serait plus tendre. 

 

Risquera-t-on une guerre thermo-nucléaire intercontinentale, alors que nous avons déjà atteint notre objectif géostratégique ?

 

Il est urgent d’entrer dans une logique de désescalade et de retour à la table des négociations. On entend : ‘Ah, mais les Ukrainiens ne veulent pas négocier !’ La résistance ukrainienne ne tiendra pas trois jours sans le soutien occidental. Très concrètement, M. Zelensky fera ce que lui commandent les Américains, c’est la réalité crue. Quant aux Russes, ce n’est pas comme si leurs ‘brillants’ résultats sur le terrain leur donnaient intérêt à poursuivre leur funeste aventure ukrainienne.

Il est temps de négocier, ce qui implique de quitter les visions extrémistes. La Crimée est russe, elle l’est historiquement, elle l’est démographiquement : tout accord négocié reconnaîtra ce fait.

 

La pomme de discorde, c’est évidemment le Donbass. Le Donbass est, pour partie tout du moins, composé de territoires dont la majorité de la population se dit russe et ne veut rien entendre du régime ukrainien. Rappelons que le régime ukrainien n’est pas sans reproche. Après le coup d’État de 2014, quand un président pro-russe fut remplacé, dans la violence et contre le prescrit constitutionnel, par un président pro-américain, s’ouvrit une campagne de répression féroce des Russes ethniques dans le Donbass. En 2014, la Russie a commencé à les soutenir, y compris sur le plan militaire. D’où cette guerre civile larvée dans le Donbass depuis huit ans. La seule solution conforme aux principes occidentaux et du droit international — j’insiste : occidentaux ! — serait de laisser les populations du Donbass se prononcer sur leur avenir, au terme de référendums organisés dans des conditions irréprochables (à l’inverse de la triste parodie de référendum que viennent d’y organiser les Russes.)

 

Concrètement, rien ne changera avant novembre 2022 et la probable victoire des Républicains aux législatives américaines (que je prévois plutôt large). Encore la politique étrangère est-elle le privilège de la présidence, soit le très fatigué M. Biden, entouré de néo-conservateurs ultra-belliqueux comme on n’en a plus vu au pouvoir depuis l’équipe Bush Jr. Dépendant des évolutions sur le terrain, nous risquons donc de devoir attendre 2024 (ie, la présidentielle) pour que les Américains quittent leur logique maximaliste en Ukraine.

 

Et l’Europe, me direz-vous ? Eh bien l’Europe est évidemment le maillon faible de la coalition occidentale. Tout intoxiquée par l’idéologie ‘verte’, l’Europe s’est mise dans une situation d’extrême faiblesse. On ne veut plus du gaz russe. Très bien ! Mais qu’en sera-t-il, cet hiver et l’hiver prochain, quand l’alternative sera entre rouvrir ne serait-ce que partiellement le robinet du gaz russe, et laisser mourir l’industrie européenne et geler sur pattes des millions d’Européens ? Les ‘dirigeants’ de l’UE se montreront-ils aussi farauds qu’ils le sont actuellement ? Rien n’est moins sûr.

 

Ce dont l’Europe a besoin, c’est d’hommes d’États ; des gens qui, à l’instar d’un Churchill ou d’une Thatcher, sont capable de faire triompher l’intérêt général dans la durée, sur les péripéties du moment. Yes, we can !

Drieu Godefridi

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